Réservations difficiles et ponctualité incertaine, l’offre de trains de nuit peine à répondre à la demande


En 2023, près de 600 000 personnes ont décidé de voyager à l’étranger en
train de nuit, selon le rapport de gestion des CFF. Et si la tendance est
clairement à la hausse, l’expérience n’est parfois pas à la hauteur des
attentes.

Les préoccupations écologiques de certains vacanciers ont tendance à les
pousser de l’avion vers le train. Il y a deux ans, à la sortie de la crise
sanitaire du Covid-19, les compagnies ferroviaires européennes promettaient
elles aussi le retour du train de nuit, après des années de pénurie due en
grande partie au succès de l’aviation low cost.

Les Chemins de fer fédéraux suisses (CFF) ont également fait ce pari en
ouvrant plusieurs lignes internationales. Les voyageurs suisses peuvent
désormais s’endormir en Suisse et se réveiller à Berlin, Hambourg,
Amsterdam, Vienne, Prague, Zagreb ou Budapest. Depuis la Suisse romande, de
nouvelles lignes reliant Barcelone et Rome devraient également être
ouvertes prochainement.

Co-présidente des Jeunes Verts du canton de Vaud, Gaëlle Valterio a décidé
de tenter l’expérience et d’embarquer à Zurich en direction de Vienne. «
C’était une vraie envie de prendre le train de nuit. Je ne l’avais jamais
fait et j’avais vraiment envie d’essayer. Il y a une volonté de réduire
l’impact carbone (…) et puis ce n’est pas si compliqué, en une nuit, on y
est», a expliqué celle qui est aussi conseillère municipale de Bex.

Pour ce trajet entre la Suisse et la capitale autrichienne, les prix des
billets varient de 150 à 200 francs aller simple. A ce prix, Gaëlle
Valterio a eu droit à des petits chaussons, des bouchons d’oreilles, un
masque de nuit, un chiffon, un stylo et même du prosecco.

Cependant, le confort reste rudimentaire et l’espace est limité. “Ça ne
représente pas vraiment ce qu’il y a sur les photos, je ne suis pas déçue
mais surprise quand même (…) J’ai un peu l’impression que si je ferme la
porte, je suis sous l’escalier d’Harry Potter”, a-t-elle déclaré.

Le train arrivera finalement en gare de Vienne le lendemain, avec une heure
de retard. Pour Gaëlle Valterio, le voyage s’est plutôt bien passé. “Ce
n’était pas la nuit la plus reposante, car je ne pense pas que mon corps
soit habitué à bouger en dormant, mais honnêtement, c’était relativement
confortable (…)” explique-t-elle.

Si le déplacement de l’édile communale de Bex s’est relativement bien
déroulé, d’autres usagers ont vécu des expériences moins encourageantes.

« Un jour, nous avons eu la désagréable surprise de découvrir que la
voiture-lits n’était tout simplement pas là. Nous avons donc dû passer la
nuit assis », explique un voyageur rencontré lors d’un voyage
Bâle-Amsterdam. « Avec le train de nuit, j’ai toujours eu de mauvaises
expériences. La dernière fois, j’avais six heures de retard et une autre
fois, je suis arrivé à la maison avec trois heures de retard », ajoute un
autre passager.

À Berne, au siège des CFF, nous reconnaissons les possibilités
d’amélioration. « Si nous devons faire des travaux sur les voies à court
terme, c’est pendant la nuit. Cela influence directement la ponctualité de
ces trains. Nous comprenons que les gens ne sont pas contents, parce que
nous-mêmes ne sommes pas contents quand la qualité n’est pas bonne (…) Nous
nous excusons auprès des voyageurs qui ont eu de mauvaises expériences,
mais avec nos partenaires, nous sommes en train d’améliorer la situation”,
explique Sabrina Schellenberg, porte-parole du groupe.

Si les problèmes sont résolus, selon les CFF, les retards dans le
développement des trains de nuit pourraient déjà avoir des conséquences.
Selon David Raedler, directeur de l’Association Transport et Environnement
(ATE), les clients pourraient être découragés.

« Nous sommes confrontés aujourd’hui à deux gros problèmes. Le premier est
l’offre. Nous n’avons pas fait suffisamment d’investissements, ce qui
signifie que les gens chercheront des trains de nuit et ne trouveront
finalement pas l’offre. Ils vont donc se replier vers l’avion”,
explique-t-il.

« Le deuxième gros problème, ce sont les réservations, les
sur-réservations, les erreurs administratives (…). S’il est confronté à ce
type de problème, il n’a pas forcément envie de réitérer l’expérience et
privilégiera alors l’avion. Il est donc essentiel de disposer d’un système
de réservation fiable et simple », ajoute le président de l’ATE.

Même si de nombreux problèmes subsistent, il existe désormais une réelle
volonté politique de développer ce type de transport. Dès 2025, 30 millions
de francs de subventions annuelles seront injectés dans le trafic
international, y compris les trains de nuit.

Toutefois, cette aide reste controversée. Certains soulignent
particulièrement le manque de rentabilité du modèle. Pour Benedikt Weibel,
directeur général des CFF entre 1996 et 2007, chaque franc suisse de
subvention pour les trains de nuit est un mauvais investissement.

« Il y a tout simplement trop peu de passagers. Le train est un moyen de
transport de masse. Sa force, c’est qu’il transporte un très grand nombre
de personnes en journée », explique-t-il.

La députée PLR genevoise Diane Barbier-Müller milite également pour le
développement du train de jour. Elle se bat actuellement pour l’ouverture
d’une ligne directe entre Genève et Londres en moins de 5h30.

« Un train de jour nous permet d’avoir 900 passagers et de faire plusieurs
allers-retours dans la journée. L’intérêt est donc économique. La ligne
sera beaucoup plus facilement rentabilisée avec un train de jour»,
juge-t-elle.

Les CFF préfèrent y voir une offre complémentaire. « Il y a beaucoup de
voyageurs. Alors ils peuvent y aller en train de nuit et revenir en train
de jour, ou vice versa. Donc, ça se complète vraiment », conclut Sabrina
Schellenberg.

Source : News Day

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